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Patrick Cabasset

C’EST QUOI CE PASTEL ?

Dernière mise à jour : 29 avr. 2022

Dans le cadre de sa Earth Week 2022, ESMOD vous invite à un atelier d’exception. Bruno Berthoumieux, maitre pastelier au Château des Plantes, raconte la teinture naturelle au Pastel et dirige quelques expériences pratiques avec cette plante essentielle. Rencontre.


Bruno Berthoumieux, Directeur de Pastel de la Serre


Passionné, Bruno Berthoumieux est né dans une belle demeure : le château de La Serre à Cambounet-sur-le-Sor dans la région de Toulouse. Sur les terres de cette propriété familiale depuis 1800, il cultive une plante magique, le Pastel, capable de teindre en bleu de façon naturelle tous les textiles. Cette plante traditionnelle du Pays de Cocagne faisait travailler dans la région jusqu'à 250.000 personnes au XVIe siècle. Les célèbres tours d’orgueil –ou tours capitulaires- de la région toulousaine sont ainsi nées des fortunes accumulées grâce au Pastel. Un artisanat remplacé aujourd’hui par la teinture industrielle, ses coloris chimiques et les désastres écologiques qui ont accompagné cette évolution. « Extrêmement polluante la teinture des jeans, telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui, nécessite par exemple quelques 5000 litres d’eau par pièce ! » s’insurge Bruno Berthoumieux.


Le château de la Serre est situé au cœur du Domaine du Pastel de la Serre


« Notre ligne de conduite depuis 12 ans avec Pastel de la Serre c’est la teinture végétale à l’ancienne, précise-t-il. Ici, la réduction se fait de façon naturelle grâce au fructose qui est également hypoallergénique. Ceci produit des bleus très clairs et irréguliers, très pastels justement, contrairement aux procédés utilisant des hydro-sulfites qui produisent des bleus très vifs ». C’est pourquoi les jeans industriels d’aujourd’hui ne peuvent atteindre les coloris clairs que grâce à des opérations de lavages et délavages très consommateurs d’eau et d’énergie.

Quelques exemples d'écharpes teintent naturellement au Pastel



Après des études de technicien agricole et avec l’envie de reprendre les terres familiales, Bruno Berthoumieux fait d’abord un passage par le marketing, en vendant des engrais naturels. Il rejoint ensuite le site familial où son frère avait déjà lancé une entreprise de création d’huiles essentielles. En 2010, la fratrie décide de se lancer dans la culture et l’extraction du Pastel.


Plante indigofère comme le colza, le Pastel nécessite cependant des grandes quantités de feuilles (ici ce n’est pas la fleur qui sert à la teinture). Avec une tonne de feuilles, on extrait environ un kilo de pigment. Mais contrairement à la plupart des teintures végétales, le Pastel n’est pas soluble dans l’eau et ne nécessite donc pas de fixatif chimique. C’est l’oxydation, au contact de l’air, qui fait naitre les beaux bleus pâles des teintures au Pastel.

Un champs de Pastel au Domaine de la Serre


« Aujourd’hui, il n’y a qu’un petit marché touristico-écologique pour le Pastel constate Bruno Berthoumieux. Sur notre site nous faisons des visites historiques, nous racontons la culture du pigment, sa technique, mais nous ne faisons que peu de teinture à façon car ce n’est pas une opération très compétitive. Ici, il faut compter environ 10€ par pièce teinte. Contre 1,50€ pour une teinture chimique… Cependant, ce procédé reste très appréciable sur de petites séries de pièces, pour des produits qui se définiraient plus haut de gamme. Pour rendre rentable la culture du Pastel, il faudrait bien entendu la breveter et la protéger ».


Bruno Berthoumieux, Maître Pastelier en action


Déjà reconnu comme Patrimoine Immatériel Français par le ministère de la culture depuis un an, le Pastel du Château des Plantes est cultivé avec une traçabilité digne de l’industrie cosmétique. Cette plante peut prétendre à une future AOC par exemple (Appellation d’Origine Contrôlée). Avec ses cuves de 800 litres, le site de distillation travaille ainsi déjà pour le groupe pharmaceutique Pierre Fabre par exemple.

« Notre politique est de ne travailler ici qu’avec des produits locaux, poursuit Bruno. Même les tissus que nous utilisons doivent provenir d’une production locale. Depuis deux ans je me bats pour produire une écharpe en laine du Tarn, tissée à Castre, confectionnée à Carmaux et teinte chez nous donc, à Cambounet-sur-le-Sor. Une réussite. Une autre écharpe est réalisée en 60% chanvre et 40% coton. Son chanvre est cultivé à Cahors et nous avons le même projet avec du lin. L’essentiel est aussi de préserver un sourcing intégralement bio ».


« Le pastel raconte l’histoire du Pays de Cocagne, conclu Bruno Berthoumieux. Avec cette technique unique je ne veux pas me lancer dans l’industrie, mais rester dans le haut de gamme afin de préserver le côté naturel de chaque produit ».



Pour découvrir l’histoire passionnante et le savoir-faire du Pastel, rendez-vous à ESMOD du 3 au 6 Mai 2022.

12 rue Catherine de La Rochefoucauld, 75009 Paris.

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1 Comment


francoise Carayol
francoise Carayol
Oct 09, 2023

Bonjour

Comment peut on prétendre que le Pastel donne des bleus clairs et irréguliers lorsqu'ils sont travaillés en naturel et que l'hydrosulfite donne des bleus foncés ! Je suis teinturière en indigo de Pastel et d'indigofera tinctoria n, je travaille avec des cuves 100% naturelles a fermentation lente, un procede proche des cuves a la cocagne, et j'obtiens des bleus clairs à foncés, comment expliquer alors qu'au moyen âge , les teinturiers réalisaient le bleu de pers, très foncé et très prisé par la noblesse?

Leurs cuves étaient 100% naturelles!


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